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La Jackie des ricains

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CHAPITRE I

EN PENSION A ST LEONARD



Marc Antoine est mon copain.
On est tous deux en classe de première. Et pensionnaires à Saint Léonard. C’est un collège récemment installé dans ce qui fut une fabrique et sa maison de maître. Ce n’est pas celui qui est au bout de la rue des « Américains » c’est au bout de la rue La Fayette. C’est un établissement catholique et privé. Il est installé dans ce qui fut une fabrique de tissus. Pour des familles de bons catholiques, mais pas très riches. La grande cour cernée de bâtiments s’orne de vécés au fond et d’un arbre maigrichon et d’essence inconnue. D’ailleurs il va bientôt mourir. On va l’avoir à l’usure, avec nos acrobaties, alors qu’il avait résisté aux poussières des tissus.
Nos profs qu’on appelle en vrac « les curés », ils le disent tous les ans, qu’on ne le reverra plus à la rentrée prochaine.
Les bâtiments sont très « classe ». Surtout le porche de la chapelle où trône un harmonium - presque un orgue - disent certains curés frappés par ce péché d’orgueil qui a fait installer plein de sculptures sur le fronton armorié. Cela concerne aussi les façades du bâtiment, marquées par cette époque où les patrons rêvaient d’avoir autour d’eux des ouvriers heureux. Ils sont heureux aussi d’avoir récupéré cet ancien couvent confisqué jadis par les révolutionnaires.
C’est un vrai objet de luxe puisque notre copain Hallar est le seul à pouvoir en jouer et que l’Abbé Galmier, notre seul ami-copain chez les curés, nous définit le luxe comme un objet quasi inutile, - ou utile à très peu de gens -.
La rue de La Fayette, - nous explique le prof de français - doit son nom à la guerre de 14. Et non aux G.I., de cette Base américaine qui est en train de s’installer, avec, comme mission, le dispatching des pièces de rechange sur toutes les autres bases d’Europe de l’Ouest.
C’est grâce à ce grand plateau céréalier qui était si joliment tout émaillé de blés dorés, avant qu’on n’y coule le béton de la piste d’atterrissage qui déssert la Base.
Pour l’instant il n’y a qu’une piste. Mais toutes les friches d’alentour sont là pour répandre les graines volantes des chardons et pissenlits ainsi que cette rumeur qui annonce qu’on va en construire une autre. Ou plus ?... Mais une autre rumeur dit aussi qu’on va démolir notre collège de pauvres. Et vendre l’emplacement pour agrandir l’autre collège catho. Ce ne sont que des rumeurs, sans doute, et « nos » curés n’aiment pas en parler.
Pour la piste d’aviation, oui c’est sûr, il y en aura une seconde. Peut-être deux autres...


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