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Les Chats Nus

Livre III

Deux chats nus d’Ethiopie,
s’étant pris d’un goût à la fois
antithèsique  et moderne-chic
pour les couleurs que n’avait pas leur poil
inexistant,
s’installèrent à New York ( U.S.A, Amérique )
peintres en batiment….

Ce qui n’est pas sans risque,
vu la hauteur
des gratte-ciel de l’endroit !
Mais, mourir ici, mourir ailleurs,
se disaient-ils, qu’importe
pourvu que ce soit dans la couleur
comme on voit aux fresques
de leur religion bronzée et copte
dont on adore les textes
que personne ne peut lire…...

Sauf quelques moines, parfois,
qui leur font dire n’importe quoi
_ mais pas n’importe quand _,
car le Saint Calendrier, depuis la nuit des Temps,
impose à leur délire
ses jours, ses lunes et ses mois,
dont les incroyants
rigolent misérablement
à l’ouest, comme à l’est.

Donc, nos deux chats de même religion
dégringolent dans un coup de vent
de leur échafaudage ;
en même temps que quelques trognons
de bambous
du haut du vingt-cinquième étage.

Le bruit fait accou-
rir aux fenêtres bureaucrates et résidents,
car ce n’est pas fréquent ,
et plutôt rigolo,
d’être à la fois au cirque et au boulot.

Or, dans ce destin
qui s’annonce commun
pour nos deux dépoilés,
l’un rit à gorge déployée :
il tombe, la tête tournée vers le ciel
dont les couleurs et les formes des nuages
sont très exactement l’image
de l’idiot du village éthiopien
dont les singeries mettaient un peu de miel
sur leur vie de pauvres loquedus
quand il se moquait du pope, du roi des rois,
de sa mère, de son père, et des chèvres parfois
dont il imitait à merveille
les tics les plus tordus.
L’autre hurle comme un damné
les yeux rivés au sol  où il va s’écraser :
il tente de viser,
tel une bombe féline
la foule agglutinée sur le trottoir fatal
où, en tuant quelques passants _ ce qui lui est égal_,
il sauvera sa peau si lisse, si fine,
qui vaut bien pour la sauver
la vie de deux ou trois chrétiens
new-yorkais.

Aucun des deux chats
n’est déjà
à terre,
et pourtant j’ose
vous conseiller pour cet instant
où il faudra le faire :
« choisissez le meilleur,
avec les voyeurs
qui ont entrebaillé leurs windows ! »

Mais, 
dis le moi, dis
qui aura reconnu
dans la chute des chats nus
les deux visages de l’Enfer et du Paradis,
voletant et glissant
tels des ballons d’enfants
dans le courant d’air embaumé
d’un fin parfum d’Eternité ??

* * *


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