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TROISIEME TOMBEAU

(CULINAIRE ET GUERRIER)

... Qui vous prend – Là – là – là
– Ne montrez pas si bas Père Malotru ! Pas si bas !
Pour les arts culinaires, restez au niveau de l'estomac
Ou remontez à la poitrine, pour les arts de la guerre.
– O.K. Il y eut aussi les premiers âges, tout en or avant
Le premier teuf-teuf, le premier navet... Tout, tout-neuf !
– Qu'est-ce qu'on bouffait alors ?
– Grimpe avec moi sous les toits, et tais-toi :
Ce plaisir suprême était réservé à ceux du Mont Olympe !
Par les poètes et les Dieux, tellement occupé
Ce mont-là, qu'on devait s'y tenir sur un pied,
La goule ouverte quand passait l'hélico à nectar.
Aujourd'hui, sous cette pluie, Maudit ! on s'y croirait :
Entends-tu les grêlons qui font rage sur l'auvent de toile
Du bar, d'à côté de notre chambrée d'étranges paumés?
Des graines d'archanges tombent sur la grange
Treize centi-cubes dans le pluviomètre à bougie.
Ouf ! C'est fini ! Maintenant il fait bon
Deux bonzes en goguette jouent de la clarinette
Le fakir fait danser la bordure du trottoir.
S'y coule le dégueulis vert des émeraudes
Découvertes en fraude, qui ont cheminé tranquilles
Dans des intestins bouleversés d'être soudain utiles.
Maintenant ils sont là, les bijoux beaux, au chaud
Dans la melonnière du père Kipling,
Là où niche le cobra, avec son frère, la queue de panda
Celui dont les trois poils du creux de la main
Sont érotiques aux exotiques vierges.
Mais antispasmodiques aux verges françaises !
Surtout le fut bien dans ces chemins des dames des environs
De Pavie, ou autre Dien Bien Phu. A l'aise !
Quand l’Historique Connerie te fusillait les reins. Enfin...
Rapatrié râpé comme il faut, Poux de pubis et d'aisselles,
Cocu ! comme y en a guère,
Bridé du derrière comme le Viet l'est des yeux,
Oui – retour en France – C'est dans la ruelle derrière
Chez les Père Bizeau, (les centenaires archi-jeunots,
Les vignerons-poètes qui aiment le vin, et pas la guerre)
Enfin, chez nous !
Sans la compagnie de tous ces pères fouettards ordinaires,
Qui jouent aux généraux de génie. 0 Ma Frrrance – oh –
En tenant ton sein blanc dedans ma main veinée
Après tout cet amour que je t'ai dispensé, il est juste,
Quand vient le dégoût d'huile verte de l'après amourette,
De te dire ce qu'on t'a fait dans tes cuisses levées
Où s'adoucit l'herbette de toutes nos vallées :
Saloperies des Saint-Just et autres Robespierreries
Clémenceauttises, Napoléonteuses-manies !
Es-tu l'excuse endormie de ces fiers salauds ?
Où aimes-tu ça, belle garce, que ça te fasse mal ?
Jouisseuse de la fine table-mise des marchands de canons
Qui, après boire, te font rire :
Plaisanteries gauloises sur tous les coups qu'ils tirent
Destinées à reposer les cerveaux pourris – déglingués
De tous ces cons instruits appelés ingénieurs
Instruits par qui ? – qu'auraient-pas-dû-s'ils-avaient su ?
Instruits par qui ? hein ?
Note de service n° dix bis – décret « un »
Votés – dictés par qui ? par ces gens qui se croient
La poitrine bardée de lard et citations guerrières
Si élégants quand ils font les discours au cimetière,
S'appuyant nonchalants et désinvoltes
A la croix de bois. S'excuseront tout à l'heure :
« Ma chèrre Frrrance... » Z'auront à faire ailleurs...
– Tu as deviné : peut-être des affaires de ferrailleurs –
Mais entre deux discours électoraux sous les préaux
Pavés de noisettes moroses
Et de comptines qui disent la mort des roses,
Trouveront le temps de te faire un enfant bancal,
– Ni vu ni connu –
Par derrière, pendant que sans penser à mal
Tu disais ta prière au Parti-Nouveau-Né
Bien à l'abri sous ton Grand Parapluie Syndical !...
…………………………………………..
– Comme vous y allez, père Malotru !
– Ça, pour y aller, j'y vas-mon-gars !
Et ne dis pas que l'Envie me fait mal parler
Des Saints-Sabreurs
Non, mon coeur, l'Envie, je sais ce que c'est :
Pas le même danger mais danger également malin.
Tu penses ! comme j'y prends garde au mauvais-œil
C’est l'Envie, ta soeur conventuelle,
La vraie, la seule, la toute proche, l'omniprésente :
Le vent pesteux de ces envieux qui font ton atmosphère,
Il frissonne – court chercher sa femme
L’Envie-Chipie, la sans-manière,
Elle lève doucement ses jupes en disant :
Bonhomme t'es bien là ; ... t'es rond
Bien assis... Et tu as chaud aux reins mon frère.
Tu es rempli d'esprit, de vin,
D’esprit de vin, de gnôle de Gaule antique
L’Envie sympathique frissonne en te disant :
Y’en a guère comme toi, des si bien, des si pleins !
Y’en a point, y en a peu, y'en a guère...
Si secs, si chauds dessus, si gras et si mouillés dedans.
Pose-le donc ton gros manteau en peau de chevrier asiatique
Et ton verre aussi, quand tes tics intacts te reprennent :
L’Envie déborde par dessus-dessous
De ton godet en terre plein d'esprit-de-rien jusqu'
Sur la table de bois noble et d'auberge vulgaire
Où le roi ne boirait rien
Ni pire qu'eux, ni mieux que toi !
Le voilà qui gagne les braises, ce filet pisseux !
Il va faire le bellâtre au creux du cœur du feu de l'âtre,
Y nourrir ses chaleurs et ses gaz délétères.
C'est une essence de ventre de mère apeurée.
Elle va en zigzaguant,
Réglée par son corps goutteux de chère marâtre à petit vieux
C'est là que l'Envie… prise d'envie, à quatre pattes
Gagne la paille des chaises des vieux envieux grognons
D'un même coup rote et se gratte la glotte,
Roussit les ails et les oignons du plafond,
L'auréole de symboles… et fout le feu à la maison…
– Beau comme un Goya, un Breughel. C'est bizarre et solide :
On dirait les grilles du métro.
Maintenant Père Malotru un peu d'histoire de l'art
(L'art avec un t pas un d. Pas drôle ! arrêtez de rigoler !
Avec vous, faut toujours préciser.) Vous J'avez connu, le grand
peintre ?
Qui n'employait jamais que gouache naturelle
En bouse, bile, crachat, que sais-je ? De l'école
Des autobusiaques, hyperbusards et faisandeurs de chats
Spécialiste de chemins de croix au couteau et gravures
Graveleuses sur fesses volubiles ? Vous le connûtes :…
Il paraît que vous eûtes la même maîtresse,
Et ceci sans que vous sussiez qui de vous cocu fut… !?
(– Chut ! Il évoque. I'n'fait qu'à… depuis qu'é'qu'temps.)
Alors… disait Renoir au bord de l'eau
En lâchant ses pinceaux. A quoi bon ? !


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