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Le Robot et le Cornard

livre I

Un grand esprit tordu,
lassé des labyrinthes
de ses réflexions encore plus
saugrenues
qu'un jambage d'échelle miné par les termites,
finit d'améliorer la formule inédite
d'une nouvelle dynamite,
Puis, tout - de - go,
décida de fabriquer un robot,
pour faire taire sa ménagère
toujours à se plaindre des tâches coutumières.
Celui qu'il fit fut le plus beau
et le plus réussi électroniquement :
Il faisait tout pour elle
tout comme notre savant
l'eût fait, assurément,
s'il avait eu du temps
pour la vaisselle.
Il l'avait sculpté
dans un matériau doux et léger,
de visage et corpulence
tout à fait à sa ressemblance,
car il se trouvait très chouette allure
étant très sûr d'avoir belle prestance
et bonne mine
auprès de la gent féminine.
Tout allait pour le mieux au logis



- hormis pour les araignées-
Et la ménagère du savant
- celle de chair et d'os, s'entend -
riait ou souriait
d'un bout à l'autre de la journée
en montrant toutes ses dents
et une humeur jolie.
Or, il advint
que revenant plus tôt
d'un congrès à Toronto,
notre ami
trouva au lit
sa femme qui souriait tout en se trémoussant
et le robot - si semblable à lui - même -
qui lui disait "je t'aime"
sur son disque rayé.
Décontenancé,
et sans vouloir déranger,
notre savant reprit aussitôt l'avion
avec un ami philosophe
qui se rendait à Düsseldorf
au congrès des sophistes
qui, cette année,
devaient établir l'étalon
de l'échelle universelle
de la méchanceté



liée au degré d'intelligence
(évaluée lors d'une autre séance)
et à l'influence des sens
ou de la raison.
Il voulut à tout prix
qu'on ajoutât
à la question débattue,
celle ci :
"est-on cocu
quand on a mis dans son ménage
un autre soi-même,
dont on admirait - partageait
jusque là sans problème
joliesse, tendresse tout - à - fait nôtre,
habileté à faire et dire
choses douces ou sages
et sentiments pour les autres ?"

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