Il faisait un temps à rêver
lourdement à des choses légères
dans cet été à la démarche mal assurée
de vieillarde maquillée et fière
C'était bientôt midi
et le chien du philosophe dormait
sous le palmier cerné par les replis
des mosaïques de la fontaine azurée.
Dans sa villa troglodytique
son maître es logique
tentait d'équilibrer des élucubrations
dont les munitions sont
selon Saint Augustin
incompatibles avec les canons
de la pensée des païens,
chrétiens, mahométans ou philistins,
mais qui, selon le maître
allait enfin permettre
de sauver l'Humanité
des ses péchés.
A quelques pas de là
la canichette de la poétesse, sa voisine,
ronflotait dans la cuisine
en digérant son repas
tandis que sa maîtresse
s'inquiétait de la richesse
des rimes et de la variété
des onomatopées
d'un sonnet.
De telles occupations d'esprit
en plein midi !
alors que tout sommeillait dans Ur
et dans Jérimami !!
Ce n'est pas dur
à comprendre : ils se sont endormis.
Par une familiarité
que seul un rêve peut générer
(car d'ordinaire
ils s'ignoraient superbement)
les voilà dans les airs,
se tenant par la main, et nus
comme deux amants
au septième ciel transportés,
flottant sur des nuages levés
avec les parfums des hammams
liés aux narcotiques fumées
des Cambodges et autres Siams.
Les chiens, à l'instant,
par le même enchantement
se trouvent mariés
et volent attachés
sans complexe
Par les colliers et le sexe.
Cependant,
ni l'un ni l'autre des deux amants
ne connaissait la destination
vers laquelle ils volaient :
serait-ce l'extrême excitation
d'une planète bohème réservée aux frissons ?
…du
le droit de poser sa joue
sur l'épaule d'un Messie
parmi ses cheveux longs ?
(ce qui serait plaisant, aussi).
Cela versait sur leur bonheur
d'être si libres, nus et aimants,
quelques gouttes de rancœur.
Mais les chiens, eux,
tout au contraire, avec aux yeux
un petit air malin,
suivaient à l'odeur
dans les airs les amants,
sûrs, que, ce faisant,
ils étaient sur le bon chemin.
* * *
